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Les jeux olympiques au Japon et le nucléaire

09.01.2014 Une lettre à tous les jeunes athlètes qui rêvent de venir à Tokyo en 2020 et à leurs entraîneurs et à leurs parents: De certaines choses, de faits certains que l’on se doit de savoir.

Le 7 septembre 2013, lors de la 125ième séance du Comité International Olympique, le Premier Ministre du Japon Shinzo Abe a déclaré ceci:

Certaines personnes se font des inquiétudes au sujet de Fukushima. Je peux vous assurer que nous maîtrisons la situation. Fukushima n’a jamais causé et ne causera jamais de dégâts à Tokyo.

A coup sûr, on s’en souviendra, dans les temps à venir, de cette déclaration : un des énormes mensonges des temps modernes. Au Japon, on dit : « LE MENSONGE ABSOLU ». Y accordant foi, le C.I.O. a pris la décision que les Jeux Olympiques de 2020 se dérouleront à Tokyo.

Les porte-parole du gouvernement japonais soutiennent la déclaration d’Abe en nous disant que les taux de contamination radioactive dans l’Océan Pacifique n’ont pas encore dépassé les normes de sécurité.

Cela nous rappelle l’histoire du vieil homme qui saute du haut d’un immeuble de 10 étages et qui, pendant sa chute, entend les voix de chaque étage lui répéter : JUSQU’ICI, TOUT VA BIEN : « So far, so good ».

Rappelons-nous bien que, quand on parle de l’Océan Pacifique, on parle du plus grand océan du monde, c’est-à-dire de la plus grande réserve d’eau de la planète et, pour autant qu’on le sache, de l’univers. Cela fait deux ans et demi que TEPCO, la Compagnie d’électricité de Tokyo continue de déverser l’eau à travers ses réacteurs dont les coeurs ont fondu à Fukushima et dans l’océan, et – jusqu’ici – l’Océan Pacifique a été capable de diluer cette eau en demeurant au-dessous des normes de sécurité.  TOUT VA BIEN. Mais nulle possibilité – en vue – d’arrêter la fuite des eaux.

Là 8 choses qu’il nous faut bien savoir:

1. Dans un parc d’une zone résidentielle de Tokyo, distante de 230 kilomètre de Fukushima, on a découvert et constaté que le taux de radiation de la terre du sol était de 92,335 Becquerels par mètre carré. Il s’agit là d’un taux dangereux, comparable et correspondant au niveau de contamination des lieux classés zone ?4 sur la carte retraçant les surfaces contaminées en césium137, en 1986, autour de la centrale de Tchernobyl. Une des raisons pour lesquelles l’on atrouvé dans la capitale du Japon un tel niveau de pollution, c’est qu’entre Tokyo et Fukushima, il n’y a pas de montagnes assez hautes qui auraient pu arrêter les nuages radioactifs. Dans la capitale, les personnes qui comprennent le danger évitent, à tout prix, de manger les aliments produits dans l’est du Japon.

2. A l’intérieur des réacteurs 1 et 3 de la centrale de Fukushima (Fukushima Daiichi), les tuyaux de circulation de l’eau de refroidissement se sont rompus, ce qui a provoqué la fusion du coeur des réacteurs. Cela signifie que le combustible nucléaire a surchauffé, fondu et continue de faire fondre tout ce avec quoi il entre en contact. Ainsi il a fait fondre le fond de la cuve du réacteur, puis est ensuite passé à travers le plancher de ciment du bâtiment et s’est enfoui dans le sol et sa couche souterraine. Comme je l’ai déjà dit, les ouvriers de TEPCO n’ont cessé de déverser désespérément de l’eau dans les réacteurs mais on ne sait pas si l’eau déversée atteint, actuellement, le combustible fondu. Si un tremblement de terre d’énergie moyenne arrive, il est probable qu’il détruise totalement le bâtiment déjà sérieusement endommagé. Et de fait, durant ces deux dernières années et demie, des tremblements de terre successifs n’ont cessé d’ébranler les installations endommagées de Fukushima (Autre fait que je dois là ajouter: au moment-même où cette lettre s’écrit, un autre tremblement de terre d’énergie moyenne vient d’assaillir Fukushima mais il semble que les bâtiments aient encore tenu le coup, encore une fois). JUSQU’ICI, TOUT VA BIEN. Et puis, il y a le réacteur 4 qui est particulièrement dangereux : en sa piscine de stockage y est déposée une énorme quantité de combustible nucléaire : tout à fait, comme si un autre grand désastre attendait son heure.

3. L’eau de refroidissement qu’on déverse dans les réacteurs constitue, à l’heure actuelle, le problème majeur, aux yeux de l’information au Japon. Les journaux et les chaînes de télévision qui, auparavant, faisaient tout leur possible pour dissimuler et taire le danger du nucléaire, nous donnent chaque jour des informations sur ce danger et s’en prennent à Shinzo Abe pour le mensonge qu’il fit au C.I.O. La question, c’est que l’eau hautement irradiée pénètre les couches souterraines et se mêle aux eaux : aucune possibilité d’arrêter cette fuite ; cette eau s’éparpille dans les eaux du large de l’océan. Impossible de maîtriser un pareil état des choses. En août 2013 (un mois avant le discours d’Abe au C.I.O.), on a mesuré, à l’intérieur du site de la centrale ? de

Fukushima, un taux de radiation atteignant 8500 microsieverts par heure : taux si élevé qu’il est suffisant pour tuer une personne qui séjournerait un mois sur ce site. Cela en fait un endroit terrible pour les ouvriers qui y travaillent et tentent d’y accomplir leur tâche. Dans la ville OKUMA où se situe la centrale, on a mesuré en juillet 2013 (2 mois avant le discours d’Abe au C.I.O.) un taux de 320 microsieverts par heure. Un tel taux tue une personne y séjournant constamment en 2 ans et demi. Ainsi, sur une zone s’étalant sur plusieurs kilomètres, voyons-nous de  plus en plus de villes totalement mortes.

4. Un oubli qui préserve le prestige des J.O. 2020 de Tokyo : on a omis un fait important dans les informations et rapports émis à destination de l’étranger. Seul y est mentionné le fait que l’eau irradiée fuit en s’écoulant sur la surface du sol autour du réacteur. Mais c’est que, profondément au-dessous du sol, les eaux souterraines ont été aussi irradiées et on sait que les eaux souterraines s’écoulent ver la mer et se mêlent à l’eau de mer par le biais des sources du socle de l’océan (voir ci-dessous l’explication concrète de ce processus). Là, on ne peut plus rien faire : trop tard.

5. Si vous allez au grand marché central de la vente des poissons de Tokyo et si vous y mesurez les radiations de l’air, votre compteur indiquera une valeur voisine de 0,05 microsieverts: valeur dépassant un peu la norme. Mais c’est que si vous mesurez les radiations près de l’endroit où on a placé l’instrument de mesure des radiations des poissons, vous aurez un taux de deux ou trois fois plus élevé (mesures constatées en 2013). Les légumes et les poissons venant des environs de l’aire de Tokyo, seraient-ils même irradiés, ne sont pas jetés. C’est que le taux de radiation autorisé dans les aliments (taux au-dessus duquel la vente est interdite) que le gouvernement Japonais a fixé, équivaut au taux de radiation selon lequel les matières faiblement radioactives sont classées comme déchets de faible radioactivité. Ce qui veut tout simplement dire que, dans le Japon d’aujourd’hui, le pays ayant été entièrement contaminé, nous n’avons plus d’autre choix que de mettre sur nos tables et dans nos couverts des déchets irradiés. La distribution dans tout le pays de la nourriture irradiée fait également problème. Les aliments provenant des lieux voisins de Fukushima sont envoyés dans les autres préfectures et c’est que dans la préfecture où ils ont été envoyés, on les étiquette comme produits de cette préfecture. De plus, les aliments distribués par les grandes compagnies d’alimentation et les aliments servis dans les restaurants chers et coûteux ne font quasiment jamais l’objet de mesures. Il s’agit là d’être particulièrement attentif.

6. Au Japon, le seul des éléments radioactifs s’étant échappés et s’échappant des réacteurs de la Centrale ? de Fukushima que l’on mesure, c’est le césium radioactif. Mais c’est que de grosses quantités de strontium 90 et de tritium se sont répandues et se répandent sur tout le Japon. Les rayons émis par le strontium et le tritium sont les rayons bêta : d’où l’extrême difficulté à les mesurer. Le strontium peut provoquer des leucémies et le tritium des troubles chromosomiques.

7. Encore plus dangereux: afin, disent-ILS, de se débarrasser de la pollution radioactive qui est tombée sur une large partie de l’est du Japon, ils raclent la couche supérieure du sol et la mettent dans des sacs en plastique qu’on dépose dans des lieux en plein air, tels des ordures ordinaires. C’est ansi que, dans les champs de l’est du Japon, on peut voir, exposés en plein air, à tous vents, de gros tas de sacs de plastique…pouvant être assaillis par les fréquentes intempéries que sont au Japon les fortes pluies et les typhons. Lors, il peut facilement arriver que le plastique éclate ou se déchire et alors le contenu du sac s’éparpille çà et là. Et si cela arrive, plus de moyen et plus d’endroit pour les confiner à nouveau.

8. Le 21 septembre (tiens! ceci à nouveau au moment où cette lettre s’écrit), le journal TOKYO SHINBUN donne l’information que Naoki Inose, le gouverneur de Tokyo, a déclaré, lors d’une conférence de presse que ce que Abe avait voulu dire au C.I.O., c’était son intention de maîtriser la situation, d’en obtenir le contrôle. Et le gouverneur a ajouté : « La situation, on ne la contrôle pas, maintenant ».

It’s a sad story = c’est une bien triste histoire mais telles sont bien les choses, tel est bien l’état du Japon et de Tokyo à l’heure présente. J’aimais bien la cuisine japonaise et ce pays jusqu’à ce que l’accident de Fukushima n’arrive. Mais maintenant qu’il est arrivé, maintenant…

Les Jeux Olympiques, pour quoi?

Voulez-vous venir à Tokyo, un Tokyo à l’air pollué, à l’eau contaminée, et vous adonner, là, aux joies du sport?

Voulez-vous manger de la nourriture irradiée?

A cause de l’accident des réacteurs de Fukushima Daiichi, le Japon se trouve, aujourd’hui, dans un état anormal: jamais auparavant, l’humanité n’a fait l’expérience d’une telle anormalité des choses.

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